« Touché ! »

« Touché ! »

Sixième dimanche du temps ordinaire B

Lectures : Lv 13, 1-2, 45-46 ; 1 Co 10, 31 – 11,1 ; Mc 1, 40-45.

Un pied dans la tombe

Quand l’homme de la Bible est plongé dans le malheur, il n’a pas peur de se plaindre et de se lamenter devant le Seigneur. Le recueil des psaumes offre même les paroles à celui qui chercherait ses mots. Dans le psaume 87, il y a des paroles poignantes que le lépreux de l’évangile de ce dimanche aurait pu faire siennes : « Ma place est parmi les morts, avec ceux que l’on a tués, enterrés, ceux dont tu n’as plus souvenir, qui sont exclus et loin de ta main. » (v. 6)

Du temps de Jésus, la lèpre était considérée comme une maladie contagieuse, et celui qui la contractait devait vivre et habiter à l’écart. Il devait éviter tout contact avec les personnes en bonne santé et se manifester par une sonnette ou une crécelle pour que les passants gardent bien leurs distances. Ou il devait crier bien fort : « Impur ! Impur ! » A l’époque, la maladie était incurable et considérée comme une mort à petit feu.

Exclu du village ou de la ville, le lépreux peut déjà dire : « Ma place est parmi les morts, avec ceux que l’on a tués, enterrés. » Il ne fait plus partie de la communauté des vivants, il a déjà un pied dans la tombe ou au séjour des morts. Pour les juifs, le séjour des morts (les enfers, au pluriel), est le lieu où, après son décès, l’humain mène une vie d’ombre, une vie qui n’a plus de consistance, un lieu où l’homme est coupé du Dieu vivant. On considérait que les morts étaient pratiquement oubliés de Dieu : « Ma place est parmi les morts, avec ceux dont tu n’as plus souvenir. »

Non à la résignation !

Dans le cœur de notre lépreux de l’évangile, il n’y a pourtant pas de résignation. Au plus profond de son être, il aspire à la vie, à la communion avec le Dieu vivant et avec les hommes. Il veut faire partie de la communauté des vivants. Et cette aspiration le pousse à aller, avec audace et témérité, vers le Seigneur Jésus.

Au lieu de se tenir à bonne distance, au lieu de crier : « impur, impur ! », il vient se jeter aux pieds de Jésus en le suppliant : « Si tu le veux, tu peux me purifier. » 

Visiblement, Jésus est touché au plus profond de son cœur à la vue de cet exclu qui aspire à la communion, et « il est pris de pitié. » La traduction française est faible : on devrait dire que Jésus est « remué au plus profond de ses entrailles. » Ce sont les sentiments d’une maman qui s’émeut à la vue de son enfant dont la vie est en péril. Que ne ferait-elle pas pour que son enfant vive, pour qu’il vive pleinement heureux !

« Je suis loin de ta main, » disait le psalmiste. Et que fait Jésus ? Il étend la main pour toucher l’homme. « Je le veux, sois purifié ! » A l’instant même, la lèpre le quitte et il peut réintégrer la communauté des vivants.

Un peu de publicité ?

Il doit néanmoins se présenter d’abord aux prêtres pour qu’ils constatent sa guérison et donnent le feu vert pour son retour parmi les vivants. A l’ordre de se montrer aux prêtres, Jésus en ajoute un deuxième, celui de n’en parler à personne ! Interdiction d’ébruiter l’histoire de sa guérison ! Mais notre homme ne saurait se taire. C’est plus fort que lui, et il raconte partout ce que Jésus a fait pour lui. Cette publicité « monstre » ne manque pas son effet : tous se mettent à la recherche du « guérisseur de Nazareth ». Et Jésus ne peut plus entrer ouvertement dans une agglomération sans se faire harceler. « Il restait dehors dans des endroits déserts. » Le Seigneur prend sur lui le destin du lépreux. Nous ne sommes qu’au tout premier chapitre de l’évangile de Marc, et discrètement, l’évangéliste fait déjà allusion à la fin : Jésus prendra une place parmi les exclus, les morts. Il descendra au séjour des morts (aux enfers, comme le dit le symbole des apôtres). Ceux qui y séjournent ne peuvent pas s’élancer vers Jésus comme l’avait fait le lépreux. Alors, Jésus s’élance vers eux. Ils ne sont pas exclus de la vie, ils ne sont pas loin de la main de Dieu : le crucifié leur tend la main, il les empoigne littéralement pour les tirer de là et les entraîner avec lui dans la résurrection. Car personne n’a sa place parmi les morts ! Dieu a créé l’homme pour qu’il vive éternellement en communion avec lui. « Il n’est pas le Dieu des morts, mais le Dieu des vivants ! »

Et il ne nous est pas interdit d’en parler ! Bien au contraire : Permission d’ébruiter tout ce que Jésus a fait pour nous !

                                                                                                 Abbé Leo Palm


Prière universelle

Le Seigneur entend nos supplications et nos plaintes. Pleins d’espérance, offrons-lui notre prière commune :

            Refrain : Dieu de tendresse, souviens-toi de nous.

  • Seigneur, nous te confions tous ceux qui souffrent et qui peinent à cause de la maladie, de la vieillesse ou du handicap : donne-leur la patience et l’espérance, et bénis tous ceux qui les entourent et les soignent. Nous t’en prions.

 

  • Seigneur, nous te confions tous ceux qui sont mal dans leur peau à cause du mépris, de l’exclusion ou du racisme : bénis tous les efforts fournis en vue de l’entente et du respect mutuels, soutiens tous ceux qui œuvrent pour un monde plus fraternel. Nous t’en prions.

 

  • Seigneur, nous te confions tous ceux qui vivent dans l’insouciance et dans l’indifférence : bénis les prophètes de notre temps pour qu’ils nous secouent et nous réveillent ; soutiens tous ceux qui nous disent qu’un autre monde est possible. Nous t’en prions.

 

  • Seigneur, nous te confions toutes nos communautés chrétiennes : bénis chaque membre de l’Eglise ; soutiens tout particulièrement ceux qui se consacrent corps et âme au Christ et à son Evangile. Qu’ils soient témoins de ta tendresse et de ta miséricorde pour le monde. Nous t’en prions.

Seigneur, tu es remué au plus profond de ton être à la vue de la misère humaine, et tu nous as envoyé un Sauveur, Jésus, le Christ, notre Seigneur. Amen.


Un chant pour ce dimanche


 

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